Bujumbura, le 9 janvier 2014(COSOME)- La cour constitutionnelle a rendu public, mardi soir, un verdict favorable à la moitié des huit dispositions de la nouvelle loi sur la presse au Burundi qui avaient été attaquées en inconstitutionnalité, le 5 juillet dernier, par l’union burundaise des journalistes (UBJ, un syndicat indépendant des professionnels des médias au Burundi).
Les articles 61, 62, 67 et 69, « contraires à la Constitution », étaient en gros, relatifs aux fortes amendes transactionnelles pouvant s’élever à 5.000 dollars us en cas de délit de presse jugé « grave », comme l’atteinte à la sûreté de l’Etat.
D’autres délits « mineurs » de presse, dans les articles « anticonstitutionnels », étaient passibles d’une amende pouvant aller jusqu’à 1.000 dollars us, comme dans le cas d’un dirigeant de droit ou d’un service de presse audiovisuelle qui émet ou fait émettre, d’un journal ou site web qui publie « sans autorisation du Conseil National de la Communication ou en violation d’une décision de suspension ou de retrait ou sur une fréquence autre que celle qui lui a été attribuée ».
Par contre, l’UBJ n’a pas eu gain de cause sur les articles 19, 21, 58, 68 de la loi sur la presse du 4 juin 2013 qui sont « conformes à la Constitution du Burundi ».
L’article 19 est relatif au secret de la défense nationale, la monnaie, la vie privée, l’enquête judiciaire au stade pré-juridictionnel ou encore aux outrages et injures à l’endroit du Chef de l’Etat, aux communiqués, appels ou annonces incitant à la révolte, à la désobéissance civile, à une manifestation publique non autorisée, à l’apologie du crime, à la réalisation d’un chantage ou d’une escroquerie, à la haine raciale ou ethnique.
L’article 21, quant à lui, stipule que « les organes de presse sont tenus de respecter leur ligne éditoriale et en cas de synergie, tout organe de presse et de communication est responsable d’éventuelles violations des dispositions de la présente loi ».
Les médias indépendants au Burundi ont eu l’habitude, depuis quelques temps, de mettre en commun leurs lignes éditoriales, le temps d’une édition de nouvelles ou d’une émission spéciale, pour décortiquer en synergie l’actualité brulante dans le pays.
L’autre article 58 qui a été sauvegardé par la cour confère des pouvoirs étendus au conseil national de la communication (CNC, organe gouvernemental de régulation des médias) qui peut, « après trois mises en garde, suspendre ou interdire la circulation, la distribution ou la vente de journaux, de périodiques ou de tout autre support d’information, la diffusion d’une émission, l’exploitation d’une station de radio ou de télévision ou d’une agence de presse quand ils violent la loi».
L’article 68 a été également jugé conforme à la constitution dans sa disposition qui prévoit qu’en cas de recours, l’auteur du délit est tenu de déposer une caution égale à 50% de la condamnation pécuniaire encourue.
Après le verdict de la cour constitutionnelle, le président de l’UBJ, Alexandre Niyungeko, a estimé qu’il y avait là une « avancée », surtout par rapport aux fortes amendes qui pouvaient frapper « arbitrairement » les journalistes, et cela « sans recours », même si la loi reste « liberticide » dans d’autres dispositions litigieuses qui n’ont pas été invalidées.
La loi doit retourner normalement au parlement pour les amendements nécessaires à la lumière du verdict de la cour, a estimé le professeur Pascal Rwankara, spécialiste reconnu du droit constitutionnel au Burundi.
En attendant, a-t-il ajouté, « il n’y a pas pour le moment de loi régissant la presse au Burundi ».
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